Condamné à rêver: Alimou, blogueur guinéen

5 avril 2011

Condamné à rêver: Alimou, blogueur guinéen

Mamadou Alimou Sow, 30 ans, blogue depuis Conakry en Guinée. Je ne sais même pas où ça se trouve sur une carte. Jusqu’ici je le connaissais virtuellement : quelques posts sur Mondoblog, comme cette photo d’un homme perché sur une montagne dans l’espoir de capter le réseau mobile qui m’avait fait sourire. A Dakar,  le virtuel est devenu réalité. Le matin même, il nous offrait un petit bracelet aux couleurs de sa Guinée : rouge, jaune et vert. Délicate attention, pensais-je. Quelques paroles, quelques regards. Nous nous retrouvons face à face dans l’exercice du portrait. Il me propose de nous asseoir sous le manguier. Premières impressions : doux et sage.

Alimou vient de l’ethnie Peule, regroupée dans la Moyenne Guinée. D’un petit village musulman où ses parents cultivent et élèvent quelques bêtes. Il a grandi dans une case, au bord des champs, seul diplômé d’une vaste famille. Combien ? « Chez nous on ne compte pas, ça porte malheur ». Il cherche. « 4 frères et 2 sœurs… Pour l’instant ». Une façon de conjurer le sort.

Dans le village c’est l’école coranique qui prime. Il y est inscrit à 6 ans.  L’école française ce ne sera qu’à 10 ans. Puis, un sans faute: collège et lycée à Conakry chez un oncle, bac en 2003, concours d’entrée à la fac et «attribution» d’une place à Labé, au centre du pays. « Les autres ne sont pas moins intelligents, j’ai juste bénéficié de bonnes coïncidences.» Doux, sage et modeste donc.

Déjà il avait coché comme priorité lettres ou relations internationales, les deux matières qui avaient à voir avec le journalisme. Ce sera anglais et bureautique. « J’ai rempli une fiche mais, au final, ce sont eux (l’administration) qui choisissent ton choix », sourit-il. Il sort, diplômé en administration générale mais l’un de ses premiers jobs sera correspondant local à Labé d’une radio privée. On ne renonce pas à ses rêves.

Depuis il «travaillote» : observe les médias guinéens pour l’Union Européenne lors de la dernière élection présidentielle, participe à Mondoblog avec « Ma Guinée plurielle » et développe des « projets », le genre dont on ne parle pas avant qu’ils se concrétisent vraiment.

Et le village ? « Quand j’y retourne, une ou deux fois par an,  je m’intègre, à part quand mon physique ne peut supporter certains travaux ». C’est vrai qu’il est plutôt chétif, silhouette d’intello. Sa vie aujourd’hui est très loin de celles de ses parents. « La préoccupation des gens chez nous c’est comment vivre au jour le jour et mourir en ayant suffisamment pratiqué pour entrer au Paradis. Le minimum leur suffit. Les ruraux ont des rêves limités. Ils sont tranquilles. » Et les intellos ? « Je suis obligé de rêver », s’excuse-t-il. « J’ai Facebook, j’ai Twitter, j’ai un Blog. J’ai des amis citadins, des potes d’école et maintenant tout un réseau virtuel. Ce sont des fenêtres ouvertes. » Ces fenêtres, je les ai rencontrées aussi au Pérou, miroir aux alouettes quand les frontières réelles sont de plus en plus verrouillées. Ce qu’il en pense ? « Tu vois là où tu veux aller sans pouvoir y aller. C’est comme vouloir posséder un IPad sans avoir les moyens ni même de le toucher. » Alors il célèbre les petites victoires : Dakar, première fois en avion, un post évidemment. Et s’emballe « je suis guinéen mais je me définis comme un citoyen universel. Bien sûr que je veux voyager, découvrir tout, le Nord comme le Sud. Peut-être que j’aurais une femme française ou péruvienne… » Plus si sage ? Juste un petit clin d’œil. Au fond, il a des rêves tout simples : un bon job, une famille. L’un implique l’autre. L’un après l’autre. Pas si facile dans un pays où « tous les jeunes rêvent de partir, car il n’y a rien à faire, pas de travail». Lui profite de sa chance : « je mange bien, je dors bien, je bois de l’eau potable. Et, même ici, dans cette aventure, je pense à ma mère. J’aurais aimé qu’elle goûte à ce confort. Chez nous le bonheur c’est forcément le partage.» Doux et sage, je vous l’avais dit. Le gendre parfait!

 

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Commentaires

Boukary
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Une rencontre chouette!

René Nkowa
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Oh là là! Trop chou...

Christelle BITTNER
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Mais il est chou!

ALIOU BARRY
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tout est bien qui commence bien et qui fini bien,avec courage et abnégation tu y presque parvenu a réaliser ton rêve c'est a dire ton métier de journaliste
voila qui est bien rédiger sur toi le point de départ des grands hommes commence comme ça.

Christelle BITTNER
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Et un vote, un!

Diana
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ohh oui cest le meilleur ke je conaisse !!!

Ameth DIA
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voilà un portrait complet avec plein d'informations. On sent aussi dans la description beaucoup de complicité, ce qui fait le charme de ce portrait.

Christelle BITTNER
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Merci! Effectivement un très bon moment

BASKARA
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Humm!!!! .... Trop cool .... et très doux à lire

Diana
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Mme n'est très loin du compte!!il est aussi très coquin et gentlement!!!:p ;)

sow
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C'est lui meme alimou sow

Oscar
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Bon portrait par une bonne descriptrice. Hééé! N'avait-il pas dit: «Peut-être que j’aurais une femme française ou péruvienne… »? (rire).

Siddy Diallo
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No Comment !

kindy
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Envoila qui résumé
Chez nous le bonheur c’est forcément le partage.» Doux et sage, je vous l’avais dit. Le gendre parfait!